Blog L'actu du vin “Notre défi est de toucher cette nouvelle génération qui ne voit pas forcément les vins de Bordeaux comme des vins modernes” Luna Gauchot
“Notre défi est de toucher cette nouvelle génération qui ne voit pas forcément les vins de Bordeaux comme des vins modernes”  Luna Gauchot

“Notre défi est de toucher cette nouvelle génération qui ne voit pas forcément les vins de Bordeaux comme des vins modernes” Luna Gauchot

En juin, les abonnés Fleur de l' ge auront pour la première fois de l'histoire du Petit Ballon, un 3e Grand Cru Classé dans leur box : Un Château La Lagune. Nous sommes partis à leur rencontre, et c'est notamment Luna Gauchot, responsable commerciale du domaine bordelais qui a répondu à nos questions.


Est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots ?

Je m'appelle Luna Gauchot et je suis responsable commerciale au Château La Lagune depuis deux ans. J'ai un parcours un peu atypique, car je ne viens pas du tout du monde du vin. J'ai étudié les sciences politiques et la communication. Après quelques années à Paris dans divers domaines, j'ai décidé d'intégrer le milieu viticole, car cela me passionnait. Et j’ai eu cette opportunité au Château La Lagune.

Justement, quelle est l’histoire du domaine ? 

La Lagune est l’un des plus anciens domaines du Médoc. En 1855, il est classé 3ᵉ grand cru au fameux classement bordelais. Il est passé de propriétaire en propriétaire, jusqu’à ce que la Famille Frey le reprenne au début des années 2000. Ils ont fait énormément de travaux de rénovation. Après avoir été major de sa promotion de l’Institut d’Œnologie de Bordeaux, Caroline Frey, la fille aînée, arrive au château pour gérer sa première vinification à 24 ans. C’était un sacré challenge pour elle : c’était une femme, jeune, et qui ne voulait pas arriver comme “fille de”. Mais elle a gagné sa légitimité. Elle s’est entourée de Denis Dubourdieu, (ndlr : professeur d’œnologie à la fac de Bordeaux et œnologue de renom) qui l’a formée, et qui est devenu son mentor.  

La famille est aujourd’hui propriétaire de quatre grands domaines historiques français (Château La Lagune, Domaines Paul Jaboulet Ainé dans le Rhône, Domaine de La Chapelle à Tain-l'Hermitage et Château Corton C. en Bourgogne). 

Aujourd’hui, combien de personnes travaillent au Château La Lagune ?

Nous sommes une quarantaine. Environ six personnes se concentrent sur la partie gestion, tandis que le reste de l'équipe travaille sur la partie technique, comme les tractoristes, les vignerons et ceux qui travaillent au chai.

Caroline Frey à la tête du domaine, Delphine Frey directrice marketing communication, vous à la tête du commercial, des vigneronnes dans les vignes : on peut noter une grande présence féminine au domaine, dans un secteur qui est généralement masculin. Est-ce un choix délibéré ?

Ce n'est pas un choix délibéré, mais plutôt une conséquence naturelle de notre philosophie d'équité et de neutralité. Jean-Jacques Frey a eu trois filles : c’est un entrepreneur inspirant, qui a inculqué à ses filles des valeurs d'audace, de perfectionnisme et d'exigence. Cela a conduit naturellement à avoir ici une équipe diversifiée et une parité naturelle. 

Le Château La Lagune est connu pour ses engagements éco-responsables. D’où vient cette philosophie ? 

Depuis l'arrivée de Caroline Frey en 2004, il y a eu un tournant vers des pratiques plus durables. Le premier millésime certifié bio était le 2016, ensuite en 2022, nous avons été le dixième château à Bordeaux à obtenir la certification en biodynamie sous le label Biodyvin. C'est une philosophie qui a nécessité des investissements importants et un changement d'état d'esprit. Cela implique un projet humain où chacun est impliqué pour porter ce projet de manière cohérente.

En arrivant au domaine, on voit des moutons, des ruches. Est-ce une pratique courante à Bordeaux ?

Non, ce n'est pas commun (rires) même si cela s’est beaucoup développé sur les dernières années ; Caroline ne vient pas d’ici (ndlr : elle est native de Reims) et elle est arrivée avec une vision innovante de l'agriculture et des idées différentes. Nous essayons de recréer un écosystème où tous les éléments cohabitent, contrairement à l'agriculture intensive des années 70-80 qui faisait la part belle aux monocultures. Nous travaillons sur des projets comme l'agroforesterie, l’écopâturage, d’où les moutons, mais aussi les vaches marines dans le marais. 

Le climat bordelais rend-il la pratique du bio et de la biodynamie plus difficile ?

Oui, notre climat est capricieux avec beaucoup d'humidité, ce qui favorise les maladies cryptogamiques comme le mildiou et l'oïdium. Ça rajoute de la difficulté, mais ce n’est pas impossible. Nous constatons que la vigne s'adapte et que les sols se régénèrent, ce qui nous donne beaucoup d'espoir.

Est-ce que le fait d’être certifié en bio/biodynamie est un argument qui séduit les consommateurs ?

Il y a plusieurs profils de consommateurs. Les plus âgés, qui achètent depuis longtemps, ne sont pas forcément sensibles à la biodynamie. En revanche, les jeunes consommateurs sont très sensibles à ces pratiques et sont en recherche de ces vins. Notre défi est de toucher cette nouvelle génération qui ne voit pas forcément les vins de Bordeaux comme des vins modernes.

D’ailleurs, vos engagements envers la nature se devinent sur la jolie étiquette de la cuvée petite sœur, Moulin Château de La Lagune. Est-ce une stratégie pour attirer une nouvelle clientèle ?

Complètement. Déjà, c'est un vin plus accessible financièrement, tout en conservant la qualité et le savoir-faire d’un domaine en grand cru classé. Le design moderne et le packaging sont également pensés pour attirer un public plus jeune et casser les codes bordelais traditionnels. Pour la petite histoire, c’est Delphine Frey, la sœur de Caroline, qui a redessiné cette étiquette. 

Le Château La Lagune a été le décor de l'émission Objectif Top Chef pendant plusieurs années. D’où est partie cette collaboration ?

Cela tenait à cœur à Caroline : elle est très attachée au monde de la cuisine, aux chefs. Et ça a beaucoup de sens de conserver le lien entre vin et gastronomie. Cela a été un beau coup de projecteur pour le domaine et le décor parfait pour l’émission. 

On parle de cuisine… est-ce que vous avez un plat ou un moment fétiche à conseiller à nos abonnés pour déguster un Château La Lagune ?

Ça serait vraiment l'enfermer dans quelque chose que de mentionner un seul plat. L'important est de l'apprécier en fonction du contexte et des gens avec qui on est. Je dirais que le Château La Lagune se boit pour toutes les occasions qui se prêtent à partager un bon moment. 

Sur votre site, il est écrit "Ce sont les détails qui font les grands vins". Est-ce que vous pouvez nous confier votre secret : quels sont ces détails ?

Les détails résident dans chaque petite attention, que ce soit à la vigne ou au chai. Faire du vin, c’est de la chimie, cela nécessite énormément de précision, de rigueur et d'attention. 

Chaque petit détail compte : une préparation de biodynamie, le choix des barriques selon les caractéristiques des cépages, un tri manuel des grains, une sélection par parcelle… ce sont ces petits détails mis bout à bout qui participent à la qualité des vins. Et puis ici, tout le monde est passionné et dévoué à faire de grands vins, ça aussi ça compte (rires).

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