Plongée avec Juliette Rembert dans le monde de l'agroécologie
Chez Le Petit Ballon, on adore mettre en avant les pratiques de nos vignerons, ces véritables super-héros du terroir. Saviez-vous qu'ils sont de plus en plus à mettre en place une viticulture dite régénératrice (ou agroécologie) ? Nous sommes partis à la rencontre de Juliette Rembert de l'association Pour une agriculture du Vivant (PADV) pour en savoir plus sur cette épopée vertueuse de la vigne et du vin au service de l'en-vin-ronnement.
Bonjour Juliette, peux-tu te présenter en quelques mots ?
Je suis Juliette Rembert, ingénieure agronome de formation. Actuellement, je suis Responsable Services Adhérents Aval chez l’association Pour une Agriculture Du Vivant (PADV).
Avant d’entrer dans le vif du sujet, tu peux nous expliquer ce qu’est l'agroécologie appelée aussi agriculture régénératrice ?
C’est une démarche de progrès vers une agriculture qui s’inspire des mécanismes du vivant. Les ambitions de l’agroécologie sont multiples : régénérer les sols, favoriser la biodiversité, améliorer la qualité de l’eau, lutter contre les dérèglements climatiques ou encore reconnecter le lien entre animal et végétal sur les territoires. Cette démarche intègre à la fois des dimensions environnementales, sociales, sanitaires, sans oublier les questions relatives à la résilience des fermes et des systèmes d’exploitation.
Ça répond donc pleinement aux défis climatiques auxquels les viticulteurs doivent faire face ?
Oui, tout à fait ! Les viticulteurs sont confrontés au dérèglement climatique, avec des événements météorologiques extrêmes affectant la production et la qualité des produits. Ils se sentent parfois démunis face à la sécheresse, les fortes pluies, ou au gel… dont les conséquences sont majeures pour la résilience des vignes. Par ailleurs, la lutte contre l’érosion des sols est un défi majeur à relever pour les viticulteurs, car sans un sol de bonne qualité, riche en biodiversité et capable de stocker l’eau, ils ne bénéficient pas d’un contexte favorable pour cultiver des vignes en bonne santé… Or sans vignes en bonne santé, ils n’ont plus d’outil de travail.
Quelle est la différence entre l’agroécologie, l’agriculture bio et la biodynamie ?
La viticulture agroécologique, c'est prendre soin des sols, de la plante et des viticulteurs, c’est donc une démarche de progrès qui rassemble les pratiques les plus vertueuses des méthodes/labels existants pour améliorer la résistance des fermes. À ce titre, l’agroécologie n’est pas un cahier des charges auquel le viticulteur doit répondre en appliquant telle ou telle pratique, mais bien une diversité de moyens à mettre en œuvre par ses soins.
Quelle est la mission générale de Pour une Agriculture Du Vivant ?
PADV est une association relativement jeune. Depuis six ans, elle est le tiers de confiance dans la transition agroécologique. Nous sommes un mouvement de coopération qui engage tous les acteurs de l’écosystème agricole et alimentaire, dans la transformation vers un modèle résilient.
Notre objectif est de créer des filières agroécologiques avec à la clé des contrats incitatifs et rémunérateurs pour les agriculteurs, qui les encouragent à progresser, qui répartit le coût de la transition entre tous les acteurs… pour cela, nous avons trois deux actions phares : éclairer les enjeux de chacun, favoriser le pilotage de la transition grâce à un outil commun et systémique - L’Indice de Régénération.
Il y a par ailleurs une notion de mise en relation entre différents acteurs de la chaîne d’approvisionnement ?
Oui, c'est exactement ça le rôle de tiers de confiance… mettre autour de la table les agriculteurs, les coopératives et les industriels pour se mettre d’accord sur les objectifs à atteindre et définir ensemble les moyens, techniques et financiers nécessaires à mettre en œuvre pour les atteindre.
Comment se passe l’accompagnement des viticulteurs intéressés par cette démarche ?
Pour chacun des viticulteurs, la première étape est de réaliser un état des lieux de son exploitation grâce à l’Indice de Régénération. Grâce à cela, il aura une vision globale et pourra ainsi décider du plan de progrès qu’il va mettre en œuvre pour progresser vers l’agriculture de régénération. Le second point important est la formation. L’agriculture de régénération n’est pas une science exacte, il est donc primordial, de se former, de tester et d’échanger avec d’autres viticulteurs et c’est ce que nous leur proposons.
Tu évoques l’Indice de Régénération, de quoi s’agit-il exactement ?
Le sol est l’indicateur clé d’une bonne santé du domaine en termes agroécologique. L’Indice de Régénération des Sols permet, d’une part, de mesurer la performance agroécologique du domaine et, d’autre part, de piloter techniquement et façon pertinente des démarches de progrès, sans être dogmatique. On obtient un score sur 100. À partir de 40/100, le vigneron est considéré comme engagé dans la transition agroécologique. Cet outil est particulièrement adapté, car il donne aux viticulteurs la totale liberté des choix techniques et des voies de progrès les plus adaptées à son domaine.
Quelles sont les actions que peuvent mettre en place les viticulteurs engagés ?
Nous promouvons l'utilisation de couverts végétaux, la simplification du travail du sol entre et sous les rangs, la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires et toute pratique qui vise à favoriser la biodiversité (les insectes, vers de terre, les pollinisateurs, les oiseaux). Une transition agroécologique passe aussi par le choix de variétés adaptées, à la sécheresse, à la chaleur et aux maladies par exemple, pour une meilleure résilience des exploitations.
Est-ce que vous faites face à des freins de la part d’agriculteurs hésitant à s’engager dans cette démarche ?
En agroécologie, il faut se former, tester des pratiques, expérimenter… les efforts pour se lancer en agroécologie demandent beaucoup d’investissements (financiers, temps, matériels, formation…) et sont peu rémunérés. C’est pourquoi, nous valorisons un modèle qui vise la mise en place de contrat entre les agriculteurs et les autres acteurs de la chaîne d’approvisionnement, plus justes et pérennes. D’autre part, le regard des voisins et des paires peut freiner l’engagement d’un agriculteur : une parcelle avec un couvert végétal, peut être considéré comme sale ou signifier un faible niveau technique de l’agriculteur. En revanche, on voit que les nouvelles générations sont beaucoup plus enclines à se lancer dans la transition !
Au sein de PADV, combien comptez-vous d’agriculteurs engagés ?
Au cours de nos six années d'existence, nous avons grandi rapidement, atteignant 91 entreprises adhérentes et 1500 agriculteurs en transition.
Comment vois-tu la viticulture dans 20 ans ?
Dans un monde idéal, nous aurions des domaines viticoles plus résilients, peu de sols nus, avec des couverts végétaux diversifiés. Les viticulteurs verraient leurs efforts agroécologiques financièrement valorisés, et nous serions les témoins d’une agriculture plus foisonnante et diversifiée dans nos territoires.
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